À compter de 2024, la facturation électronique interentreprises devient progressivement obligatoire. Quelles sont les obligations à remplir, comment s’y préparer et que risquent les sociétés qui ne s’y conforment pas ? (Photo : Pixabay)
« La facture électronique, il faut en parler, il faut s’y intéresser dès maintenant, interpelle Tristan de Brouker, chef de marché comptabilité et gestion commerciale -TPE et experts-comptables – chez Sage. Il faut désigner des référents internes, par exemple, ou mandater son expert-comptable ». En effet, dans moins de 18 mois, la réforme de la facture électronique rentre en vigueur dans notre pays. La réforme de la facturation électronique a débuté le 1er janvier 2017 pour les grandes entreprises (plus de 5 000 salariés) qui travaillent avec le secteur public. Elle a ensuite été étendue à toutes les entreprises sans exception au 1er janvier 2020, toujours pour les échanges avec le secteur public.
Toutes les organisations concernées envoient ainsi leurs factures au format électronique via le portail Chorus Pro de l’Etat français. Selon les chiffres du gouvernement, plus de 140 millions de factures ont transité par ce dernier depuis 2017. Toutefois, pour l’Etat, les transactions interentreprises restent faiblement dématérialisées, ce qui génère des surcoûts pour les entreprises. C’est donc dans ce contexte que les pouvoirs publics rendent obligatoire la facture électronique à partir de 2024 pour toutes les organisation publiques ou privées, assujetties ou non à la TVA. Seuls les acteurs qui réalisent des opérations exonérées au sens des articles 261 à 261 E du Code général des impôts (notamment les activités de santé et d’enseignement) sont exemptés.
Un calendrier progressif suivant la taille des entreprises
Plus précisément, toutes les sociétés devront être capables de recevoir des factures électroniques à compter du 1er juillet 2024. En revanche, la date d’obligation d’émettre au format numérique dépend de la taille de la structure : 1er juillet 2024 pour les grandes entreprises de plus de 5 000 salariés, 1er janvier 2025 pour les entreprises de taille intermédiaire (entre 250 et 4 999 salariés) et 1er janvier 2026 pour les TPE et PME ainsi que les microentreprises (moins de 10 salariés). Ainsi à partir de 2026, plus aucune entreprise ne pourra envoyer de facture par mail au format pdf ou par la Poste en format papier à partir d’un document Word ou Excel. Des pratiques encore très courantes qui ne seront plus conformes aux exigences de la Direction générale des finances publiques (DGFiP). Les factures seront obligatoirement adressées par l’intermédiaire du portail public de facturation (PPF, émanation de Chorus Pro) en cours de développement ou des plates-formes de dématérialisation partenaires (PDP) qui seront certifiées par l’administration fiscale (voir troisième partie) dans quelques mois.
L’e-reporting pour le B2C et l’international
Par ailleurs, les structures qui commercent en BtoC ou avec l’étranger ne sont pas directement concernées par la facturation électronique. Elles auront en revanche une obligation d’e-reporting, c’est-à-dire de transmission de certaines informations à l’administration fiscale (livraison de biens soumis à la TVA, prestation de services soumis à la TVA, livraisons de biens et prestations de services réalisées par des assujettis établis en France et qui ne sont pas situées en France, etc.). Par exemple, si l’entreprise utilise un logiciel de point de vente (POS), elle déclarera un récapitulatif de tous les tickets délivrés pendant la journée. Tout comme l’e-invoicing, l’e-reporting permet de reconstituer l’activité économique d’ensemble d’une entreprise. Quant à son entrée en vigueur, elle suit le même calendrier que la facture électronique. Un décret émis en octobre dernier précise, à ce titre, les modalités de réalisation du e-reporting et la périodicité des transmissions.
Des sanctions possibles à la clef
En cas de non-respect de toutes ces obligations, des amendes sont d’ores et déjà prévues : 15 € par facture en cas de non-émission au format électronique plafonnés à 15 000 € par année civile et 250 € par transmission en cas de non-respect de l’obligation de e-reporting, plafonnée à 15 000 € par année civile. Bien sûr, comme le mentionne Tristan de Brouker, il y aura un seuil de tolérance… L’Etat ne prévoyant pas de sanction à la première infraction constatée. De son côté, Thomas Honegger, COO de Esker France Benelux et Suisse se montre assez optimiste après 2026 : «cela va permettre de moderniser les flux qui ne le sont pas encore. A terme, les entreprises bénéficieront d’un système central et en verront l’intérêt rapidement. On se concentrera alors sur une digitalisation des processus plus en profondeur. »
Benoît Huet
Cet article fait partie d’un dossier sur la facturation électronique à retrouver sur site de notre publication sœur Le Monde Informatique
Retrouvez l’original de cet article sur le même site.